Hier soir, avec François W. et Michel H., et leurs compagnes respectives, pour parler des prix à venir (mais non, les éditeurs ne choisissent pas...), nous avons déniché un petit resto turc à table ronde au quartier latin, pas très loin de chez Gabriel M., qui vient de s'acoquiner avec C., une petite jeunette qui, non seulement, prépare délicieusement les blinis, mais vient de terminer une thèse sur l'infini qui va faire date pour un bon bout de temps.
Bref, nous en étions au chapitre "souvenirs littéraires", et "Les liaisons dangereuses" occupaient la conversation. Comme toujours avec Michel, François n'est pas en reste d'ailleurs, la sexualité n'était pas loin. Aussi, "Les liaisons dangereuses" ayant été une des lectures de mon adolescence, un de celles destinées à satisfaire ma curiosité érotique, quand je dis à mes interlocuteurs et trices, peut-être un peu fort, "J'ai été déçu, A quinze ans, je m'étais précipité dessus et ça ne m'a pas fait bander", j'ai senti le regard de la femme de la table d'à côté, comme une guêpe me piquer le cou. Je me suis retourné. Elle me regardait en souriant de ce sourire légèrement carnassier qu'acquièrent les femmes à la quarantaine. J'ai du rougir imperceptiblement. Ses yeux se sont mis à briller, et d'un gracieux mouvement de tête, elle m'a lancé "Ce sont des choses qui arrivent".
Soudainement et pendant une seconde, de façon très douce, j'ai eu quinze ans.